Paroles de lauréats
Entretien des porteurs du projet « Libération- Centre-ville » lauréat du programme Engagés pour la qualité du logement de demain
Les lauréats interviewés

A.D. Anne DEU-TANNIERE MOE Directrice de projet chez LeibarSeigneurin Architectes

J.M. Jules MOUSSEIGNE MOE Architecte associé chez LeibarSeigneurin Architectes

C.R. Cédric RIVET MOA Directeur général chez Véalis

A.B. Audrey BERGEOT MOA Directrice des opérations chez Bouygues Immmobilier

Quel est votre rôle dans le projet ?

A.D. Je suis Directrice de projet au sein de l’agence LeibarSeigneurin architectes et j’ai été en charge de cette opération depuis le début des études en 2013 jusqu’à la livraison de l’ensemble de l’opération. Pour ce projet, nous avons tenu la plume dès les prémices de l’opération parce que c'était un concours qui nécessitait une collaboration promoteur-architecte. Donc, nous étions dès le début en équipe avec le promoteur et nous avons pris part, dès le début, à la mise en place du dessein et des intentions du projet. Classiquement, nous travaillons pour un promoteur qui a établi au préalable un programme sur une parcelle et qui a souvent fait réaliser une première faisabilité capacitaire qui « donne le ton ». Là, ce n'était pas le cas puisque nous avons co-construit le programme, le projet et le coût travaux, étant donné que les promoteurs avaient une offre foncière à faire à Renault. Nous avons été vraiment partenaires de la première heure avec le promoteur, ce qui change la donne.

J.M. Je suis Jules Mousseigne, architecte associé de l’agence LeibarSeigneurin. Ce projet a quand même été une opportunité rare de se faire confiance mutuellement et d'être à la genèse du programme, pas seulement mettre au propre un programme qui nous a été donné. Nous avons réussi à bouger les lignes et à initier, tant sur le plan urbain que sur les typologies d'appartements ainsi que sur le respect vis-à-vis du « déjà-là », des propositions essayant de faire émerger une péréquation entre les besoins du promoteur et les qualités d'usage que nous, en tant que sachants, nous nous devons d’apporter. Il y a eu un équilibre qui a bien fonctionné, c'est assez rare pour être souligné, dans ce dossier dont le montage était un peu différent.

C.R. Je suis Cédric Rivet, le directeur général du groupe Véalis. Nous sommes les promoteurs de ce projet. Je dis bien les, puisqu'il y avait deux promoteurs à la maîtrise d'ouvrage de ce projet. Au sein de l'entreprise Véalis, j'incarne la direction générale. J’ai un rôle pilote, à la fois dans la conception, au niveau des moyens humains à mettre en œuvre pour accompagner les équipes de maîtrise d'œuvre dans cette conception, à la fois un rôle dans la structuration financière pour réussir cette opération, à la fois dans la stratégie commerciale et dans la mise en œuvre de cette stratégie commerciale pour trouver des acquéreurs à ce projet de logement. Et derrière, on a un rôle dans la vie de cette opération, pour accompagner les immeubles construits dans leur fonctionnement, dans leur maintenance, pour répondre aux sollicitations des clients, dans leur vie quotidienne et le fonctionnement de leur vie quotidienne avec leur patrimoine immobilier.

A.B. Je suis Audrey Bergeot, je représente Bouygues Immobilier, promoteur national. On s'est associés avec Véalis Développement, qui avait remporté le concours de l'opération « Libération Centre-Ville » il y a près de dix ans maintenant. J’ai travaillé aux côtés des équipes de Cédric à l'ensemble du montage, à la réalisation, et pour tout ce qui suit la livraison.

Pouvez-vous présenter l'opération ?

A.D. Le projet de Bouscat-Centre-ville, c'est un projet où nous avons dû concevoir une pièce de ville au centre du Bouscat, sur un territoire de 3,6 hectares où ont finalement émergé 400 logements. L’enjeu principal, c'était de reconstituer des liaisons avec le tissu viaire existant pour créer du lien entre l'avenue de la Libération, qui accueille dorénavant la ligne D du tramway de la métropole et le centre-ville du Bouscat. La définition du calibrage viaire est à la base des intentions de projet ; les logements, les commerces, les bureaux viennent s’y intégrer.

C.R. C'est une vaste opération de reconversion d'un ancien site industriel. Le but, c'était d’enlever cette friche du centre-ville du Bouscat et associer à cette reconversion des ambitions en termes de logement, des ambitions environnementales, des ambitions sociales, des ambitions économiques, puisqu'il n'y a pas que du logement, il y a aussi une vie économique, afin de structurer un nouveau quartier qui se greffe à l'existant. C’est une opération mixte de 400 logements avec toutes ces déclinaisons typologiques et toutes ces propositions de commercialisation, qui répondent aux besoins de différentes classes sociales, à différents moyens, à différents revenus de nos clients. En parallèle, il s’agit d’amener de la vie économique localement, pour que le quartier ne soit pas qu'un simple quartier dortoir, mais un nouveau quartier avec une vie de quartier et que la greffe s'opère avec tout ce qui existe autour.

A.B. Ce qui a permis le développement de ce quartier, , puisque qu’il n'y avait rien à l'époque sur ce terrain à part un Garage RENAULT, c'est notamment le déploiement de 5000 m2 de surface commerciale sur le site même et le développement des logements libres et d'une résidence services senior de 100 chambres qui permet de créer une animation de quartier avec des foyers de jeunes familles, des personnes un peu plus seniors, des commerces, tout ça au pied du tram qui est arrivé en même temps que notre projet.

Comment définirez-vous le logement de demain ?

A.D. Je pense que le logement de demain, c'est comme le logement d'hier, c'est le logement qui est adapté au mode d'habiter de l'usager. Il n'y a pas de réponse générique, pas de réponse toute faite, c'est celui qui y habite qui doit avoir le logement qui lui correspond. Notre rôle d'architecte, c'est de faire en sorte que le logement réponde à la nécessité d'usage de celui qui va y habiter, tout en participant au patrimoine collectif par le bâti que cela génère en relation avec la ville, l'espace public. Notre rôle d'architecte, c'est de réussir à allier et à faire correspondre ces deux aspirations, répondre aux besoins très individuels de celui qui va habiter et répondre à notre devoir très collectif, social et démocratique de concevoir un bâtiment qui participe à la culture et au patrimoine collectif.

J.M. Pour compléter, c'est par un seul terme assez facile et compréhensible de tous qu’on peut définir le logement de demain, c'est par la réalisation de bâtiments durables. Par la durabilité au sens premier du terme, c'est-à-dire à pouvoir passer les époques, participer à l'appropriation de la mémoire collective des gens du quartier, de la ville et par la durabilité, la capacité de ces bâtiments à se renouveler eux-mêmes par les usages qui vont évoluer dans 10, 20, 30, 40 ou 50 ans. Au même titre qu'on peut le voir sur les bâtiments plus anciens, typiquement haussmanniens, bordelais, où ils durent dans le temps et les gens ont une capacité à s'approprier les bâtiments, à les renouveler dans le temps. Je pense que la notion de durabilité, pour faire patrimoine, est la première réponse. Ensuite, par l'intériorité, il peut y avoir des solutions structurelles, de trames pour faciliter ces évolutions. Je pense qu'on ne peut pas répondre uniquement par l'adaptabilité intérieure, en mettant de côté la coque extérieure qui doit passer le temps. C'est comme ça que les gens s'approprieront de génération en génération, par mémoire collective, le bâtiment et le feront évoluer. Peut-être qu'un jour ce ne sera plus du logement, peut-être que ce seront des bureaux ou bien encore un nouveau programme. Mais il y a un passage dans le temps, dans le sens durable de la chose, c'est la première réponse à apporter.

A.B. Je pense que le logement de demain, c'est un logement qui se voudra adaptable et évolutif, qui pourra s'adapter aux besoins des foyers qui vivront demain. C'est surtout des logements dans lesquels nos habitants se sentent bien, parce que le rôle premier de nos métiers, c'est de loger des habitants.

C.R. Le logement doit être flexible pour répondre à l'évolution de la vie. Il doit aussi être abordable, pour que le plus grand nombre puisse y accéder. Il doit être vertueux, bien entendu. On ne doit pas oublier la surenchère du coût de l'énergie, donc on doit de moins en moins en consommer et laisser un impact environnemental le plus faible possible.

L’entretien a eu lieu à l’oral le 04 avril 2024 à l’occasion de la revue de projets à Bordeaux et a été réalisé et édité par Léo KIRCHENGAST, Stagiaire au sein du programme Engagés pour la qualité du logement de demain opéré par le GIP L’Europe des projets architecturaux et urbains.